Les causes de l'autisme

Lorsque je donne des conférences sur l'autisme, je ne parle pas spontanément des causes de l’autisme. Si vous connaissez un peu mon parcours, vous savez que l’aspect clinique de l’autisme n’est pas ce qui retient mon attention. Cependant, c’est une question qui revient systématiquement à la fin de la conférence lors des échanges avec le public, sous différentes formes : 

  • « J’ai entendu dire que les vaccins causent l’autisme, c’est vrai ? »

  • « Si les parents sont autistes, est-ce que les enfants peuvent l’être aussi ? »

  •  « Est-ce que la pollution joue un rôle ? », etc.


C'est la raison pour laquelle il me semble important d'aborder sur ce sujet. Nous allons dans un premier temps présenter les causes de l’autisme pour ensuite déconstruire certaines idées reçues.

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Les causes de l'autisme génétiques et environnementales

Devient-on autiste ou nait-on autiste ?
Première chose à préciser : on naît autiste, on ne devient pas autiste. 

L’origine de l’autisme est multifactorielle, ce qui veut dire qu’il n’existe pas une cause, mais une combinaison de facteurs qui favorisent l’apparition de l’autisme. À ce jour, deux catégories de causes ont été identifiées :

  • génétiques ;

  • environnementales.

En ce qui concerne les causes génétiques : il n’existe pas un gène de l’autisme. Plus d’une centaine de gènes prédisposant à l’autisme ont été identifiés. La probabilité [1] d’être autiste est multipliée par trois chez les demi-frères et sœurs, par dix chez les frères et sœurs, et par cent cinquante chez les vrais jumeaux. Le rôle de l’hérédité est donc très important dans l’autisme. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’au moment où un enfant est diagnostiqué autiste, un de ses parents, voire les deux, réalise être lui aussi concerné. J’ai reçu de nombreux témoignages en ce sens, et il est vrai que c’est un chamboulement pour l’adulte, qui relit alors son parcours de vie avec une nouvelle grille de lecture.  (Pour plus d'infos sur les signes de l'autisme, vous pouvez consulter cet article)

En ce qui concerne les causes environnementales, les recherches n’en sont qu’à leurs débuts et présentent parfois certaines failles méthodologiques. Les éléments suivants ont cependant été identifiés :

  • L’âge des parents : plus ils sont âgés, plus la probabilité d’avoir un enfant autiste augmente.
  • Les médicaments ingérés par la mère lors de la grossesse, comme la thalidomide ou l’acide valproïque.
  • D’autres éléments jouent lors de la grossesse : si la mère est en surpoids, si elle a du diabète, une maladie auto-immune ou un épisode fiévreux dû à une infection comme la rubéole, par exemple.
  • Lors de la naissance, la prématurité, le manque d’oxygène ou l’hémorragie cérébrale jouent un rôle également. 
 
D’autres hypothèses concernant l’exposition du fœtus aux antidépresseurs, aux pesticides, à la pollution atmosphérique ou aux perturbateurs endocriniens sont également étudiées. Elles font débat et nécessitent plus de recherches.
Si je suis souvent réticente à parler des causes de l’autisme, c’est parce qu’il manque selon moi une réflexion éthique et critique à l’égard de ce champ de recherche. Quid de ses implications eugénistes, comme la recherche d’un « traitement » ou la prévention de la naissance d’enfants autistes ? Par ailleurs, ces recherches, qui drainent de nombreux financements, ne permettent pas d’améliorer concrètement la qualité de vie des personnes autistes. Ne serait-il pas plus utile de réaffecter une partie de ces budgets à des recherches portant sur le logement inclusif [2], les outils de Communication Alternative et Augmentée ou l’insertion professionnelle, entre autres ?

Idées reçues sur l'étiologie de l'autisme

Cet article est également l’occasion de revenir sur certaines idées reçues concernant les causes de l’autisme.

Autisme et parents : déconstruire la théorie des causes éducatives

Il a précédemment été affirmé que les carences éducatives et affectives pouvaient causer l’autisme de l’enfant. Les parents, surtout les mères, étaient donc rendus responsables. Cela est totalement faux, mais reste malheureusement une idée reçue véhiculée par certain. e. s professionnel‧les de santé mal informé. e. s qui continuent, aujourd’hui encore, à culpabiliser les parents.
 

Le vaccin ROR a également été incriminé. On doit cette intox à une étude d’Andrew Wakefield parue en 1998 dans The Lancet. C’est grâce au travail du journaliste d’investigation Brian Deer que l’ampleur de la fraude a été démontrée : les données de cette recherche ont été falsifiées et son auteur principal, Andrew Wakefield, était corrompu. Il a en effet perçu de l’argent de la part d’avocats anti-vaccination et a déposé un brevet concernant un vaccin contre la rubéole dès juin 97 (soit juste avant sa campagne de discréditation à l’égard du vaccin ROR). Depuis, de nombreuses recherches se sont penchées sur le sujet et n’ont trouvé aucune relation de cause à effet entre le vaccin et l’autisme. Wakefield a été depuis radié de l’ordre des médecins, mais a su se recycler pour devenir une figure très influente au sein du mouvement antivax [3].
 
Enfin, aucun lien n’a été démontré entre la caséine, le gluten, l’empoisonnement au plomb ou au mercure et l’autisme.

Julie Dachez

Qui suis-je pour parler de ce sujet ?

Conférencière, autrice et formatrice

Je suis l’autrice de La Différence invisible, une bande dessinée traduite en sept langues, Dans ta bulle !, un livre qui donne la parole aux premières personnes concernées et de L'autisme autrement, mon dernier ouvrage.

Depuis 2014, je propose des conférences sur l'autisme auprès de publics très variés : entreprises, établissements médicaux, écoles, universités…
Et en 2022, j’ai fondé Julie Academy, une plateforme de formation en ligne dédiée à l’autisme.

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[1] Notez que je parle bien de « probabilité » et non pas de « risque ». Dans les articles portant sur les causes de l’autisme c’est bien souvent la foire aux termes pathologisants : « facteurs de risque », « atteints », « apparition du trouble », ce à quoi je n’adhère pas du tout.
[2] Un exemple de recherche portant sur l'habitat inclusif : https://habitat-inclusif-participe.univ-nantes.fr/
[3] Je vous conseille au sujet de Wakefield et du mouvement antivax l'excellent documentaire Arte : "Antivax les marchands de doute"

Bibliographie :

Andrew Wakefield : The fraud investigation. (s. d.). Consulté 20 juillet 2021, à l’adresse https://briandeer.com/mmr/lancet-summary.htm

Dans l’autisme, le rôle de l’hérédité est prépondérant. (s. d.). Consulté 20 juillet 2021, à l’adresse https://theconversation.com/dans-lautisme-le-role-de-lheredite-est-preponderant-78384

Modabbernia, A., Velthorst, E., & Reichenberg, A. (2017). Environmental risk factors for autism : An evidence-based review of systematic reviews and meta-analyses. Molecular Autism, 8, 13. https://doi.org/10.1186/s13229-017-0121-4

Taylor, L. E., Swerdfeger, A. L., & Eslick, G. D. (2014). Vaccines are not associated with autism : An evidence-based meta-analysis of case-control and cohort studies. Vaccine, 32(29), 3623‑3629. https://doi.org/10.1016/j.vaccine.2014.04.085

Warrier, V., Chee, V., Smith, P., Chakrabarti, B., & Baron-Cohen, S. (2015). A comprehensive meta-analysis of common genetic variants in autism spectrum conditions. Molecular Autism, 6(1), 49. https://doi.org/10.1186/s13229-015-0041-0